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Etats-Unis - le parc national de White Sands

Le parc national de White Sands est un des derniers nés du grand ouest américain (fin 2019). Longtemps monument national, cette merveille du Nouveau-Mexique peut ainsi bénéficier d'une protection encore plus grande. Disons-le, c'est un joyau absolument unique comme cette partie des Etats-Unis en possède tant. Il s'agit ni plus ni moins du champ de dunes de gypse le plus vaste sur Terre. 710 km² d'un sable d'une blancheur éclatante, avec des dunes atteignant par endroits 20 mètres de hauteur. Nous y sommes allés deux fois car le premier soir, le temps orageux ne permettait pas d'avoir les couleurs optimales, même si cela ajoutait au surréalisme de la scène. Le lendemain, pas un nuage en vue et un moment incroyable parmi l'immensité immaculée. Comme nous le verrons, c'est une fois de plus la géologie, avec des circonstances particulières, qui va nous permettre d'expliquer cette étendue de sable dans ce coin du pays. Il est d'ailleurs assez récent, ce sable, 12000 ans environ. Avant, le bassin était occupé par des lacs et les archéologues ont trouvé des preuves d'habitations et de présence humaine. Les hommes qui vivaient là il y a 20000 ans chassaient de gros mammifères qui profitaient de l'eau abondante (mammouths, chameaux, bisons, paresseux...). Mais le climat, toujours lui, a changé à cause d'une géologie capricieuse, l'eau a disparu, la zone s'est asséchée, et le sable est apparu... 


Abronia angustifolia White Sands
Une plante, Abronia angustifolia, vit tant bien que mal dans l'immensité des dunes blanches du parc de White Sands. 


Alors quelle est-elle, cette géologie si particulière ? Déjà situons-nous : nous sommes dans le sud du Nouveau-Mexique, dans un vaste bassin perché à 1200 mètres d'altitude, celui de Tularosa. La ville la plus proche à l'Est est Alamogordo, où vous pourrez dormir facilement. Tout autour du parc, il y a des zones militaires dans le désert, et notamment de célèbres bases d'essais militaires. S'il peut faire extrêmement chaud durant la journée l'été (jusqu'à 40°C), les mois d'hiver sont très froids (le record a été de -32°C dans les années 1960 !). Bon alors, si on revient quelques années en arrière, au Permien, juste 280 millions d'années avant notre ère, on a, à l'emplacement des dunes, des mers peu profondes. Ce sont ces mers qui ont déposé du gypse au sol, avant que l'activité tectonique ne soulève tout ça pour créer deux chaînes de montagnes. Au fil des millénaires, les pluies ont dissous le gypse emprisonné dans les roches et les rivières ont déposé le sable dans le bassin de Tularosa, qui ne possède aucun débouché vers la mer. Ce sable est donc composé de cristaux de gypse, appelés sélénite



White Sands National Park
Un ciel d'orage s'organise au coeur des dunes, proposant un spectacle enivrant ; il faudra revenir néanmoins pour profiter de la blancheur éclatante du gypse. 


Ce qu'il y a d'incroyable ici, c'est que l'on peut expliquer exactement d'où vient tout le sable : à quelques dizaines de kilomètres à l'ouest existe un vaste lac asséché, le lac Lucero, un des points les plus bas du bassin. A la suite de fortes pluies, il se remplit directement, mais aussi grâce au ruissellement des eaux de pentes des montagnes environnantes. C'est là que le gypse va se retrouver piégé. Le lac peut alors atteindre quasiment un mètre de profondeur. Quand l'eau va ensuite s'évaporer, ne vont rester au sol que les cristaux, qui vont être brisés par l'érosion en petits grains de sable que les vents dominants auront vite fait de pousser à l'Est pour qu'ils rejoignent les autres dunes... On estime que tous les 15 ans environ, de grosses crues permettent la formation d'une grande quantité de sable... 



white Sands national park
Une rare végétation s'accroche dans certaines parties des dunes ; au-delà, ces dernières sont trop changeantes et rapides pour que les plantes puissent s'y installer. 



La carte ci-contre permet de mieux illustrer ce que nous venons d'expliquer : des montagnes San Andres à l'ouest, le gypse ruisselle grâce au transport de l'eau jusqu'au lac entouré du cercle noir, qui peut se remplir entièrement. Une fois sec, les cristaux se transforment en sable, poussé par les vents vers le nord-est. On voit également que trois sortes de dunes sont mentionnées : les paraboliques, les barkhanes et les dômes. Il est à noter que ces dunes changent sans arrêt de forme et se déplacent, lentement, modelées par le vent. Le gypse étant soluble dans l'eau, après de bonnes pluies, le sable se cimente, formant une croûte solide qui protège davantage les grains du vent. On imagine que, dans de telles conditions de mobilité constante, s'adapter à la vie dunaire pour une plante n'est pas une mince affaire, et nous y reviendrons plus loin. 
- les dunes paraboliques : elles sont en forme de "U" avec un "nez" et deux bras allongés, qui sont maintenus en place grâce à de la végétation. Ces deux bras font toujours face au vent. Quant au "nez", composé de sable meuble et donc difficile à franchir à pied, il n'abrite pas de végétation. Ces dunes s'installent dans des endroits plus humides, là où de l'eau peut être stockée et nourrir la végétation attenante. 
- les dunes en croissant, ou barkhanes, sont en forme de croissant et sont plus larges que longues, contrairement aux paraboliques. De même, et à l'inverse des paraboliques, les deux pointes sont à l'opposé du sens du vent, qui vient donc frapper le "dos" du croissant. Elles peuvent fusionner entre elles, et se déplacer assez rapidement. La végétation est extrêmement rare et elles sont situées dans la partie la plus centrale et désertique du parc. 
- les dunes en dômes sont des monticules ovales ou circulaires, ne bougeant que très peu, et situés sur les bords du système dunaire, à l'écart des vents les plus forts. 



white sands NP
Le vent crée les dunes en poussant chaque grain de quartz, puis il les remodèle sans cesse, rendant finalement bien vivant cet écosystème. 


Parlons un peu maintenant de la visite du parc en lui même. Comme d'habitude, vous commencerez par vous rendre au Visitor Center qui regorge d'infos en tous genres, de la géologie en passant par les écosystèmes du parc. Vous ne serez pas seuls, car c'est le parc le plus visité du Nouveau-Mexique, et on comprend pourquoi tellement le lieu est magique. Préférez tôt le matin, dès l'ouverture, vous y serez alors seuls pour quelques précieux instants. Nous avons pu faire toutes nos photos sans aucune autre personne. Mais ce doit être pénible parfois avec toutes les luges (une des activités sur les dunes). D'une manière générale, quand vous vous éloignez de la voiture, vous êtes vite en totale harmonie avec la nature, mais gare à toujours garder le véhicule en vue, car on peut vite se perdre...



dunes blanches white sands
La sensation de se promener au petit matin dans l'infini des dunes, avec ce blanc pur, n'a pas de nom...



Du Visitor Center, une seule et unique route de 13 kilomètres filant plein nord vous fera découvrir le parc. Quelques arrêts, avec parking, vous sont proposés durant le trajet, avec à chaque fois une petite marche agrémentée de nombreux panneaux explicatifs sur les lieux. Comme toujours avec les parcs nationaux américains, l'organisation est au poil ! Parmi les balades à faire, notons : 

- Playa Trail : une boucle de 800 mètres seulement qui permet de rejoindre une playa, une dépression naturelle qui se remplit d'eau en temps de crue. Compter 30 minutes.

- Interdune boardwalk : une zone dunaire avec pas mal de végétation et de nombreux panneaux ; très facile puisqu'entièrement aménagée avec une passerelle en bois. 650 mètres AR.

- Alkali Flat Trail : tout au nord, c'est de loin la rando la plus spectaculaire puisqu'elle s'aventure au coeur des plus belles dunes. Il faut bien repérer les balises plantées dans le sable. Vous n'êtes pas obligés de faire les 8 kms AR pour trouver des paysages splendides.


Avant d'explorer ensemble l'écosystème incroyable de White Sands, voici encore d'autres photos de cet endroit hors-norme...





















Ce désert est tout sauf un endroit mort. On y trouve plus de 600 invertébrés, 300 plantes, 250 oiseaux, 50 mammifères, 30 reptiles, ou bien encore... une espèce de poisson ! Beaucoup ont une coloration blanche qui est une adaptation à la couleur du sable. Surtout, 45 espèces, dont 40 de papillons de nuit, sont strictement endémiques au désert ! On ne les trouve qu'ici au monde. 
Parlons d'abord des plantes, qui sont des pionnières dans un tel milieu. Elles servent à stabiliser les dunes, et on les trouve généralement dans des zones à l'abri du vent fort, au niveau des dunes paraboliques (voir explication plus haut), là où l'eau est retenue au maximum dans le sol superficiel. Ces plantes à leur tour sont d'une grande aide pour tout un cortège d'espèces animales, qui peuvent s'abriter ou s'en nourrir. Pour survivre dans un milieu si hostile et alcalin, la plante doit pouvoir supporter une variation de température incroyable, allant du point de congélation à plus de 40°C. Il leur faut également supporter une haute teneur en sel. Certains cactus, ou succulentes, peuvent stocker durant de longs mois l'eau récupérée durant les saisons plus favorables. 

Quant à la faune, elle aussi a dû trouver des stratagèmes pour s'adapter, puisque les eaux de surface sont quasi inexistantes. Au fil des siècles, l'évolution a généralement retenu des espèces à la coloration très claire, voire blanche. Cela leur permet de mieux se fondre dans leur environnement, évitant une trop grande prédation. Les mammifères quant à eux restent à l'abri la journée pour sortir au crépuscule et la nuit. Le reptile le plus répandu est un lézard, Holbrookia maculata, dont la sous-espèce est endémique aux dunes blanches : normalement brun, la sélection naturelle a retenu des individus blancs dans le parc, ce qui leur permet un meilleur camouflage. 


Eustoma exaltatum
Eustoma exaltatum, une gentiane affectionnant le sable. 

Holbrookia maculata ruthveni
Holbrookia maculata ruthveni, le fameux lézard blanc.

Eleodes acuta
Eleodes acuta, un ténébrion typique du désert.

Eleodes acuta
Eleodes acuta

Eleodes carbonaria
Eleodes carbonaria

Ephedra torreyana
Ephedra torreyana, un très ancien membre des gymnospermes.

Yucca elata
Yucca elata, parfaitement adapté au désert.

Eriocoma hymenoides
Eriocoma hymenoides, permet de maintenir certaines dunes.




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Etats-Unis - le parc national de White Sands Etats-Unis - le parc national de White Sands Reviewed by RENOULT on 23 novembre Rating: 5

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